vendredi 16 novembre 2007

Oubapo 2



On trouve parfois cité en référence d’articles sur le game design les travaux de l’Oulipo (Ouvroir de LIttérature Potentielle), en particulier Mille milliard de poèmes et Le conte à ma façon de Raymond Queneau qui a exploré la génération automatiques d’histoires et de poésie. L’Oubapo (Ouvroir de Bande dessinée Potentielle) est son pendant dans le 9e art. Or, contrairement à ce qu’on pourrait penser au premier abord, il s’agit essentiellement des trouvailles concernant la narration et plus particulièrement l’agencement des vignettes, qu’une recherche graphique particulière. Le contenu intéresse donc tout spécialement les jeux vidéo, qui mêlent comme la bande dessinée images et texte.


J’ai choisi le volume 2 car Daniel Blancou me l’avait recommandé concernant mes recherches sur le carré magique, et je l’ai consulté récemment pour un exercice sur la multiplicité d’écrans simultanés. En résumé, un groupe de dessinateurs s’inflige les contraintes les plus tordues avec comme objectifs d’explorer des domaines narratifs ignorés comme l’expansion qui propose développer une bande dessinée à partir d’une planche dont on réutilise des vignettes à des emplacements imposés, le hors-champ où le sujet de l’histoire n’apparaît pas dans l’image, la réinterprétation consécutive qui est la composition d’une histoire en réutilisant des vignettes d’autres bandes dessinées, l’hybridation qui mélange deux bandes dessinées pour en faire une troisième, l’exercice de style autour d’un règlement de bibliothèque, un cadavre exquis qui prend la forme d’une conception aléatoire et collective en temps limitée, etc.

Mais ce que j’ai le plus apprécié est la conception d’exercices autour du « carré magique » : planche qu’on peut lire dans tous les sens, histoire graphique dont la seconde partie se lit à rebours de la fin au commencement ou en tournant la BD à 90°, bande dessinée qu’il faut plier pour faire apparaître une nouvelle histoire, narration aléatoire ou itération iconique réglée, etc. Le contenu ludique y est évident et est un excellent tremplin pour notre réflexion.

Je regrette simplement que ce vent d’anticonformisme narratif, qui ne se prend jamais au sérieux, s’accompagne le plus souvent d’un graphisme bâclé portant des thématiques assez vulgaires. Du coup, ces recherches formelles apparaissent comme des brouillons potaches, ce qui diminue un peu leur portée. Dommage.

Une réflexion néanmoins passionnante sur la narration graphique, qui stimule l’imagination et nous invite à l’étendre au multimédia. En effet, plusieurs des idées proposées proposent un sens de lecture interactif, qui est une invitation à la concevoir différemment. Alors, à quand un Ouinpo (OUvroir d’INteractivité POtentielle) ou un Oulupo (OUvroir de LUdicité POtentielle) ?

Oubapo volume 2, de collectif, L’association 2003, 130 pages, 26

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