mercredi 9 avril 2008

La vraie vie de Sebastian Knight

Bien que le héros éponyme porte le nom d’une pièce du jeu d’échecs, il serait excessif de dire que La vraie vie Sebastian Knight est un roman sur le jeu. Il est plutôt le roman d’un auteur passionné d’échecs, qui ici code ses références au jeu. Comme cette pièce libre, dont l’évolution sur l’échiquier est sans pareille, son héros n’est jamais où on croit l’attraper. Le demi-frère du héros, comme blanc pour noir, connaît Knight de l’intérieur, sans le connaître de l’extérieur. Il part donc en quête de ceux qui l’ont connu. C’est ainsi que l’auteur va croiser l’oncle Schwartz (noir en allemand) qui sera malgré lui la clef de l’intrigue.

Les allusion au jeu se réduisent à peau de chagrin : le premier mari de la dernière petite amie de Sebastian lui ouvre la porte avec un cavalier à la main, ses rêves font allusion à un M. Noir, et une allusion aux jardins d’enfants de Froebel, qui avait le jeu au coeur de sa pédagogie, se glisse dans le texte. La symbolique de l’échiquier sous-tend en revanche l’intrigue, puisque Sebastian meurt à Saint-Damier, qui se dénoue en quelque sorte sur un échec : le narrateur trouve Knight dans le noir, ou du moins celui qu’il croit être Knight et qui l’éclaire de son âme, tout en se dérobant à jamais au moment précisément où il croit être en communion avec celui-ci ; comme le yin et le yang se poursuivent éternellement sans jamais s’unir.

Le message serait alors que toute partie vaut d’être jouée car, quand bien même l’échec peut à tout moment annuler la victoire espérée, l’un n’est jamais que le revers de la seconde, et ce n’est finalement jamais que soi que l’on sait trouver au bout de sa quête. Il ne tient qu’à nous de voir dans le faux-frère, dans cet adversaire un peu cavalier, un partenaire qu’on ne saurait comprendre sans renoncer le prendre tout à fait.

Un roman intriguant qui joue avec son lecteur, mais qui n’est pas un roman sur le jeu au sens où l’est La défense Loujine du même auteur.

La vraie vie de Sebastian Knight de Vladimir Nabokov, Gallimard (1941) 1962, 309 pages, 7 €.

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