lundi 9 juillet 2007

Le gameplay


Qu’est-ce qui fait l’essence d’un jeu vidéo ?

« Qu’on l’appelle « game design », « level design », « game play » ou « trame narrative », le scénario définit l’univers, les protagonistes, les actions et leurs enchaînements. »

Cette citation d’Emmanuel Forsans, président de l’Agence Française pour les Jeux Vidéo, complète celle de celle de mon dernier billet. Il s’agit davantage pour moi de m’en servir de base de réflexion sur le gameplay, que de critiquer l’amalgame commun qu’il fait ici entre des fonctions pourtant différentes. En effet, je le soupçonne de se montrer volontairement naïf et de ne pas questionner plus avant ces matières, pour ne pas prendre en défaut le livre de J.-Y. Kerbrat dont il rédige la préface, et qui ne fait aucune distinction entre ces termes.

Confondre le scénario et la trame narrative ne me gêne pas. Mais confondre level design et scénario, ce serait comme confondre le scénario et les dialogues. On emploi le premier comme terme générique, mais il ne comprend pas le level design, pas plus que le gameplay. Pour preuve, je peux vous raconter le scénario d’Indiana Jones, et vous vous demanderez : est-ce le film, le livre, ou le jeu vidéo ? La spécificité d’un jeu, par rapport aux autres supports, réside dans le gameplay, ou ‘mécanismes ludiques’ qui n’appartiennent qu’à lui. On peut donc réduire un jeu à son gameplay, même si commercialement c’est rarement concluant. L’exemple parfait est Tetris, ce jeu n’a aucun scénario (bien qu’il pourrait en avoir un comme n’importe quel jeu de tableaux, style Bubble Bobble), et son succès s’est fait sur la seule qualité de son gameplay, c'est-à-dire sur son principe ludique, ses règles uniques. Certes, le level design est important, car les tableaux doivent s’enchaîner de manière intuitive (courbe d’apprentissage), mettant petit à petit en scène les différentes fonctionnalités du jeu, de manière progressive (courbe de difficulté) et rythmée (courbe de rythme).

Mais le gameplay c’est plus que cela. L’ancienne définition, nous l’avons vu, faisait du gameplay le synonyme de la maniabilité et de la jouabilité. On peut lire partout que la Wii de Nintendo est une console, grâce à sa manette révolutionnaire, qui a un excellent ‘gameplay’. Mais cela exprime tout autant son potentiel ludique. Quand on définit ‘l‘action de jouer un jeu’ (game play), on discerne un affrontement entre les règles du jeu (game) et la désir (play) du joueur qui tend vers l’affranchissement de toute règles. Alors qu’est-ce qui fait un bon gameplay ? Eh bien, un équilibre parfait entre ce qui est prévu (les règles, la trame ludique, l’espace ludique…) et ce que le joueur a envie de faire. Un bon gameplay n’est pas dirigiste ou libre, il est à la mesure du joueur, ni trop prédictif, ni trop alambiqué, lui donnant l’impression de se dépasser parce qu’il lui offre le challenge idéal… celui qui paraît trop difficile et qu’il résoudra à la fin de la partie. C’est donc tout autant l’accessibilité d’un jeu (il a des règles mais elles s’apprennent en jouant, sans effort, cf courbe d’apprentissage), que sa profondeur (on peut faire ce qu’on veut, mais le joueur n’est jamais perdu, cf. courbe de progression), que son attractivité (le joueur alterne missions et plages de repos au moment opportun cf. courbe de rythme). C’est de cet aspect toujours contradictoire, tout en équilibres, que naît le plaisir du joueur.

Et si le gameplay n’était en fait qu’un nom barbare pour désigner le plaisir de jouer ?

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