A sa sortie en 1998, pourtant fan de Day of the Tentacle (DOTT), j’avais boudé le nouveau jeu de Tim Schafer car il était en 3D et que je trouvais sacrilège que Lucas Arts ait répondu aux sirènes de la 3D sur un genre qui ne l’exige pas du tout. En y jouant pour la première fois aujourd’hui, je dois malheureusement dire que je n’avais que trop raison. En effet, le jeu ne se manipule plus à la souris (!) mais à la manette ou au pavé numérique. Ainsi, au lieu de pointer et de cliquer pour faire se déplacer le personnage, on est obligé de bien comprendre comment est réalisé le décor sinon on butte comme un aveugle dans le premier obstacle venu, et on échoue à résoudre une énigme simplement parce que le personnage est mal positionné. C’est fastidieux au possible et vraiment agaçant. Rétrospectivement, les graphismes de DOTT ont moins vieillis que ceux de Grim Fandango, mêmes s’ils restent attachants, alors qu’ils sont de 4 ans plus anciens. Enfin, ces graphismes dépouillés et inanimés sont très lourds et obligent à des chargements intempestifs qui coupent l’action et font planter le jeu si on titille le clavier pendant ce temps. Génial…
C'est beau, on y retrouve malgré la 3D la patte de Lucas Art, les personnages sont habilement stylisés, mais c'est bien vide et... mort.
Ce ne serait pas si grave si le jeu était du niveau de DOTT, mais on a la désagréable impression que son concepteur n’a pas saisi ce qui faisait la qualité exceptionnelle de l’opus précédent, à savoir le scénario et l’implication du joueur. Autant l’univers et les situations de DOTT étaient (délicieusement) absurdes, autant les énigmes étaient d’une logique implacable … dans l’absurde, avec un personnage qui aidait le joueur quand il n’effectuait pas la bonne action au bon endroit. Dans Grim Fandango c’est tout le contraire : le monde est original mais très proche du nôtre (la mort est contrôlée par une corporation de VRP) alors que les énigmes sont parfaitement farfelues et sortent de nulle part : remplir deux fois un ballon en forme de vers de deux types différents de mousse expansée avant de les expédier dans un tuyau de courrier, afin de casser la machine d’aiguillage et récupérer ainsi un client important… Et tout ça complètement par hasard. Autre point désagréable, Manny Calavera, le personnage que vous contrôlez, ne vous aide presque jamais, ou pire vous induit en erreur. Plusieurs actions ou mini jeux ont été ajoutés pour tirer parti de la 3D, mais comme celle-ci n’est pas du tout lisible, ils sont non seulement incompréhensibles (j’ai pris les tuyaux de la machine à sève pour des marches, et je n’arrive toujours pas à voir la direction indiquée par la pancarte dans la forêt tellement elle est petite) mais nécessitent en outre des manipulations horripilantes car totalement aléatoires.
Si l’on excepte la musique exceptionnelle de Peter McConnell, bénéficiant d’effets d’ambiance (la musique s’éloigne ou se rapproche en fonction de la proximité du héros avec la source), et la voix excellente du personnage principal, la grande majorité des voix des personnages secondaires sont surjouées. C’est le seul jeu d’aventure de Lucas Art pour lequel j’ai déclaré forfait à la moitié, tellement il m’a ennuyé. C’est d’autant plus dommage que l’univers et le héros sont très attachants, et les dialogues de qualité. Mais passer une heure à manipuler le burritos (la voiture du héros) ou une %@0)$# de brouette afin de poser la roue sur le bon tuyau, ont douché ma bonne volonté.
Un Schafer bien décevant, dont la mauvaise jouabilité et les énigmes incohérentes ont plombé, en dépit d’une critique élogieuse, le fonds de commerce de Lucas Art, à savoir le bouche à oreille.
Grim Fandango sur PC CD-ROM, Lucas Art 1998, 2 CD, indisponible.
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