Il est agréable de constater que l'un des articles les plus simples (il tient en sept pages) et les plus efficaces écrits sur le jeu date de 1947. L'expression de Benvéniste y est d'une grande clarté et sous le dehors de faire une synthèse des considérations de son époque dans le domaine ludique (lien du jeu et du sacré), il introduit une réflexion qu'Eugen Fink développera quelques années plus tard dans Le jeu comme symbole du monde (1966).
Bien circonscrit, l'article pose une définition efficace du jeu pris pour lui-même en tant que structure : "Nous appellerons jeu toute activité réglée qui a sa fin en elle-même et ne vise pas une modification utile du réel." (p. 161) A partir de cette définition qui met en valeur le cadre et la futilité du jeu, l'auteur l'élargit au simulacre, à la relation, à l'imagination, à la liberté et au plaisir : "En ce qu'il ne conserve que la forme de sacré et la projette hors de la réalité, le jeu s'assure à la fois la magie de l'irréel et la consistance de l'humain, la joie de l'expansion libre et l'ordonnance de la sécurité. Chacun peut alors à la mesure de son imagination et de sa passion, le valoriser à nouveau et le resacraliser en fonction d'un mythe personnel." (p. 167)
Par cela et avant même Caillois, Benveniste explicite la fonction sacrée originelle dont le jeu tire sa magie et son enchantement, autrement dit ce qui relie le jeu en tant que structure à la fascination que celui-ci exerce sur le joueur, et plus largement comment il réunit narration et interaction en permettant à chacun de redevenir un héros dépositaire de son destin. Quoi de plus excitant ?
Le jeu comme structure d'Emile Benveniste, in Deucalion n°2, Editions de la revue fontaine 1947, p. 161-167, épuisé.
1 commentaire:
C'est possible avoir une copie electronique de l'article? je suis vraiment interesée dans sa lecture.
Merci beaucoup.
diana.plaza.martin@gmail.com
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