C'est dans ce petit essai que se trouve l'épisode bien connu du fort-da, de l'enfant qui jette une bobine et dit "parti" quand la bobine est loin de ses yeux, et "là" quand elle revient. Cette variante du jeu universel du "coucou je suis là" est la cristallisation de l'angoisse de la séparation d'avec la mère que l'enfant cherche à résoudre dans le jeu, et annonce les travaux de Bettelheim sur la question, tout en posant le principe de plaisir comme opposé au principe de réalité et liant ces deux principes à celui de répétition :
"Les manifestations d'une contrainte de répétition, que nous avons décrites dans les activités précoces de la vie d'âme enfantine, ainsi que dans les expériences vécues de la cure psychanalytique, font voir à un haut degré le caractère pulsionnel et, là où elles se trouvent en opposition au principe de plaisir, le caractère démonique. Dans le jeu des enfants, nous croyons saisir que l'enfant répète tout aussi bien l'exprience vécue empreinte de déplaisir, pour la raison qu'il acquiert par son activité, une maîtrise bien plus fondamentale de l"impression qu'il ne le pouvait en la vivant de façon purement passive. Chaque répétition renouvelée semble améliorer cette domination à laquelle il aspire, et même lors d'expériences vécues empreintes de plaisir, l'enfant ne peut se lasser des répétitions et il s'en tiendra inexorablement à l'identité de l'impression."
Freud soutien ainsi que le déplaisir peut-être nécessaire au plaisir et que de même le plaisir inassouvi peut être la source de déplaisir. Le seul besoin de maîtrise d'une impression frappante n'est donc pas la seule motivation au jeu et le recours à la fiction permet d'assouvir ce que le principe de réalité n'autorise pas, ne serait-ce que par la répétition de l'expérience. Cette introduction à la réflexion de Freud sur le principe de mort est pour nous bien plus intéressante que son développement ultérieur qui tient plus de la spéculation contestable autour du principe d'homéostasie (le corps fuit les écarts de tension), principe qui semble échapper à Freud en même temps que son discours.
Un petit essai pertinent et stimulant pourvu qu'on ne s'aventure pas "au-delà du principe de plaisir".
Au-delà du principe de plaisir de Sigmund Freud, PUF 2010, 76 p., 9 €
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