Spécialistes du cinéma, les deux auteurs proposent un plaidoyer pour les jeux vidéo en 1998 en reprenant pour partie le contenu de leur opus précédent, "Qui a peur des jeux vidéo ?" paru en 1993. L 'ouvrage, en dépit d'une démarche explicitement didactique : descriptif - explication - conséquences, est donc largement un justificatif du jeu vidéo face à sa perception négative par le grand public, et prend les devants des principaux reproches qui lui sont faits : violence, ethnocentrisme, sexisme, racisme... C'est sans doute en cela que l'ouvrage a le plus mal vieilli, non pas que ces reproches ne soient plus d'actualité, mais leur justification ne l'est plus. Simplement parce que les jeux vidéo ne sont pas pire que la société dont ils sont issus.
Plus grave, comme il s'agit d'un ouvrage programmatique, qui s'adresse d'abord a des non joueurs, voire à des non joueurs parents inquiets de joueurs qu'il faut à tout prix convaincre de l'inocuité des jeux vidéo, l'ouvrage fait des concessions à la vérité afin de tenter de présenter un jugement objectif et éclairé : oui les reproches sont fondés mais il ne faut pas assimiler la majorité de la production à certains vilains petits canards, oui c'est vrai certains jeux vidéo sont dangereux, oui il faut privilégier les jeux intelligents, etc. A ce stade de la réflexion, on finit par se demander si les auteurs cultivent le lieu commun, font de la médiation, flattent les convictions des parents inquiets (qui à priori n'achèteront jamais leur livre), ou sont finalement incompétents au point de ne pas s'apercevoir qu'ils reconnaissent le faux en croyant prêcher le juste milieu, faisant ainsi le jeu de leurs détracteurs.
Pourtant, malgré ces nombreux défauts, l'ouvrage est vivant et alerte, et s'il fait référence de manière outrancière aux magazines de jeux vidéo qui apparaissent être sa principale source, il sait prendre de la distance et élargir la réflexion au cinéma et autres secteurs culturels de manière pertinente. C'est donc logiquement sur la partie dont ils sont spécialistes, à savoir l'influence et l'histoire de l'audiovisuel, que les auteurs apportent leur contribution la plus sérieuse. Pour le reste, on n'est jamais loin de l'approche journalistique qu'ils prétendent combattre.
Agréable à lire, passionnant parfois, L'univers des jeux vidéo est une introduction acceptable, quoique un peu trop technique dans sa forme pour le public visé, et insuffisamment sur le fond pour les spécialistes. Mais c'est surtout un témoignage sociologique aussi involontaire qu'intéressant sur l'accueil réservé aux jeux vidéo par les sociétés industrielles au milieu des années 90. A noter : le lexique final est désopilant.
L'univers des jeux vidéo, d'Alain et Frédéric Le Diberder, La Découverte 1998, 275 pages.
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