Catalogue de l’exposition organisée par la
bibliothèque de l’Arsenal et la Bibliothèque de France, Jeux de princes jeux de vilain est un panorama des jeux du Moyen
Âge à nos jours. Rassemblant des travaux de conservateurs et d’historiens
indépendants, le sujet s’insère dans l’Histoire
de la vie privée des Français initiée par le Marquis de Paulmy en 1779,
installé à l’Arsenal, et qui devait consacrer un de ses volumes aux jeux. Cet
esprit muséologique gouverne des contributions plus descriptives
qu’analytiques, consacrées pêle-mêle à des jeux précis (échecs, dames, l’oie) à
des types de jeux (cartes, jeux d’argent, jeux pédagogiques), aux lieux des
jeux (Cour, salons), à des époques (Moyen Âge, époque moderne), mais pas à
l’acte de jouer lui-même.
Plutôt que d’établir un fil directeur
autour de l’exploration de l’activité ludique, voire des jeux d’autrefois, le
propos part d’objets épars : jeux, peintures, traités, mobilier,
accessoires et les explique. Le jeu n’est que le dénominateur commun mais pas
le sujet de l’ouvrage : il s’agit seulement de replacer l’objet dans son
contexte, et non de comprendre celui-ci. C’est d’autant plus regrettable que
les participations ne lient pas les jeux entre eux, pas plus qu’ils ne
dialoguent avec eux : on peut ainsi lire dix pages sans illustration, puis
dix pages d’illustration sans rapport direct avec la communication. Enfin la
présentation, très luxueuse, n’est manifestement pas pensée pour son
objet : la police, trop petite, gêne la lecture, certains objets commentés
ne sont pas représentés faute de place, et les notices descriptives sont
souvent trop longues et peu pertinentes.
Ainsi par exemple 3 dés très originaux sont
présentés : on sait leur taille, le matériau, le musée qui les abrite,
mais rien de leur usage. Le minimum critique n’y est pas : aucune
mention sur le contexte de découverte, pas de commentaire sur la disposition
des faces, ni sur les concordances entre les figures de l’un et le nom de celles en usage
aux osselets (le chien, Vénus…). Pourtant la question morale du jeu, comme le
lien entre le jeu et les autres plaisirs (vins, amour, gourmandise…) est
très présent et aurait pu servir de problématique à cette étude. Bref, l’objet
jeu est bien là mais l’activité et l’esprit en sont absents : l'attrait du premier ne
va guère au-delà de l’exotisme qu’il inspire. Et on se met à douter que
l’exposition soit beaucoup plus que le prétexte à valoriser les collections des
bibliothèques organisatrices.
Les contributions ne sont pas de mauvaise
qualité pour autant, en tout cas bien plus intéressantes que celles qu’ont inspirées les collections du Musée du jeu, et leur sujet, parce qu’il ne se
limite pas aux seuls jeux-objets, est tout à fait intéressant. Enfin la
participation de Jean-Marie Lhôte, qui s’éloigne des objets au profit de leur
symbolique et de leur signification, est empreinte de cette passion qui fait un
peu défaut aux autres. Un catalogue décousu mais où sont renfermées nombre de
trouvailles pour qui saura les chiner.
Jeux
de princes jeux de vilains sous la direction d’Eve Netchine, Seuil 2009, 160
pages, 38 €.
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